Patrick Levy
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Extrait

La ruse de Dieu. Le Kabbaliste et l’arbre de la connaissance


Prologue


Qu’y avait-il avant moi ? Et avant cet avant ? Où étais-je avant de naître ? Comment est-ce que tout a commencé ? Ces questions, tous les hommes se les posent depuis des temps immémoriaux ; et chacun s’y intéresse un jour. Toutes les civilisations se sont construites sur un récit mythique du commencement.


Les trois religions, dites du Livre[1], qui rassemblent à peu près la moitié de l’humanité, conçoivent l’origine du monde et des hommes en s’appuyant sur les deux récits de la Genèse qui occupent les trois premiers chapitres de la Torah[2]. Celle-ci débute avec « Au commencement… ». Et le Talmud, le livre des commentaires, s’ouvre sur la question : A partir de quand ?

Rabbi Isaac Goldman, le Kabbaliste de ce livre, a exploré avec moi le maassé béréchit, les récits du commencement, dont certains passages pour la troisième ou quatrième fois, pendant six mois, du milieu d’un printemps et la fin de l’automne.

A la suite de la parution du Kabbaliste, de nombreux lecteurs m’ont demandé de poursuivre la publication des notes que j’ai prises lors de mes rencontres avec lui. Il s’agit évidemment de bien plus que de simples retranscriptions. Ce qu’il disait en un après-midi ou une nuit était vaste et brouillon, truffé de digressions géniales mais hors de propos, et impubliable sans un profond travail de mise en forme. J’ai recentré ici les commentaires sur le premier et le sixième jour de la Création et sur le récit du jardin d’Eden. Je les ai monté de façon à ce qu’ils forment une suite cohérente autour d’un axe central, une question, suggérée par un verset du texte, et qui a continuellement guidée et inspirée Rabbi Isaac : qu’est-ce qu’un homme ?

 

Deux récits

 

Les trois premiers chapitres de la Genèse, rapportent deux récits du commencement différents. Ces deux textes, de style et de structures dissemblables, ont été écrits à des époques séparées de cinq à dix siècles[3]. Le premier, dit "élohiste" parce que Dieu y est évoqué sous le nom d'Elohim, raconte les sept premiers jours de la Création : Béréchit (Au commencement) créa Elohim les cieux et la terre… puis la lumière, il sépara les eaux, créa les plantes, les astres, les animaux, conçu un adam à son image et à sa ressemblance, puis créa l'adam à son image, et enfin se reposa. Le récit du jardin d'Eden, qui occupe les deuxième et troisième chapitres, est appelé "yavhiste" parce qu'on y voit le nom YHVH[4] associé à Elohim. Il reprend des éléments du premier chapitre dans un ordre différent, et il ajoute des détails[5]. Il se concentre sur le sixième jour avec l'apparition de l'homme, non pas créé mais formé par YHVH Elohim, et raconte les premiers pas d’une humanité naissante dans le jardin d’Eden.

Certains commentateurs ainsi que les créationnistes américains, descendants des réformés, lisent les récits de la Création au pied de la lettre et croient pouvoir affirmer, avec la force de leur foi en ce livre, que l’univers, le monde, les végétaux, les animaux et l’homme furent créés par Dieu, en six jours, il y a un peu plus de cinq mille ans. L’Eglise Romaine a renoncé à la lecture littérale en 1961.

L’hypothèse créationniste s’oppose à la théorie de l’évolution par sélection naturelle de Charles Darwin, fondée sur l’observation savante et rigoureuse, puis confirmée cinquante ans plus tard par les lois de Mendel, puis encore par la découverte de l’ADN.

Avec son injonction sola scriptura, l'Ecriture seule, Luther invitait chacun à lire et interpréter la Bible par lui-même, et cela pour deux raisons : distinguer et récuser certains des dogmes que l’Eglise de Rome lui a greffés, et développer une relation directe avec Dieu. Mais l’Ecriture seule n’est pas facile à comprendre ; elle est pleine de contradictions, et elle exige qu’on la lise dans sa langue d’origine, l’hébreu, et non dans des traductions qui sont déjà des interprétations. Avec sola scriptura, les créationnistes écartent l’herméneutique, se privant d’une tradition, longue de plusieurs millénaires, d’interprétation symbolique, exégétique, et de réflexion érudite sur le texte.

Une lecture littérale et certaine du texte hébreu n’est tout simplement pas possible. Chaque mot y forme un abîme de sens, et lire à partir de l’original en l’hébreu suppose d’hésiter avant de choisir un sens parmi d’autres que l’on sait possibles. Par ailleurs, il faudrait constater qu’en ce qui concerne la Genèse, elle ne serait pas logiquement crédible : la lumière devance les astres, l'eau n'est pas créée, et donc précéderait la Création des cieux et de la terre, la terre produit les plantes le troisième jour, alors que le soleil, la lune et les astres n'existent pas encore… Et nous verrons ici que même la lecture littérale ne permet pas de soutenir la thèse du péché originel, de la désobéissance et de la « chute » du premier couple humain, et par conséquent la culpabilité de la femme.

Le concept de « péché originel » est une donnée culturelle prégnante. Il est arrivé jusqu'à nous comme une vérité ancienne, biblique pour les croyants et mythologique pour les autres. Il a profondément pénétré la culture occidentale, sa littérature, une partie de sa philosophie et a été un motif d’inspiration récurrent pour l’opéra, la peinture et la sculpture.

Cependant, l’histoire d'Adam et Eve que nous connaissons déjà est moins celle que l'on trouve dans la Genèse que celle enseignée par le christianisme et imposée par ses dogmes. Si nous ne l’étudions pas minutieusement, nous n'en connaissons en fait que cette rumeur culturelle qui s’est affranchie du texte de son origine. Nous la lisons avec un tel bagage de préjugés, que nous ne voyons pas les nombreux détails qui s’opposent à ce nous croyons savoir avant de l’aborder.

Nous croyons donc savoir qu’Adam, premier et unique ancêtre de l’humanité, a été créé par Dieu adulte puis déposé dans le jardin d’Eden, le paradis terrestre. A la suite d’une conversation avec un serpent doué de la parole, sa femme, précédemment tirée de l’une de ses côtes, a pris le fruit de l’arbre de la connaissance du bien et du mal que Dieu avait interdit et en a donné à Adam. A cause de cela, Dieu les a maudits et les a chassés du paradis. Ainsi a-t-on pu nourrir et perpétuer le phantasme d'un paradis et d'une immortalité perdus - c'est-à-dire d'un temps où tout était parfait. Et donc d’un moment futur où tout le redeviendra.

Nous verrons dans ce livre que l’histoire ainsi racontée est assez éloignée du récit, et que c’est un peu plus compliqué et beaucoup moins dramatique.

Peu d’épisodes de la Torah ont été autant commentés que celui-là. Et s’il a permis tant d’interprétations et de commentaires c’est bien qu’il est polysémique, obscur, et parfois contradictoire. Le sens littéral présente de telles incongruités que la raison ne peut les supporter, a déjà écrit Moïse Maïmonide au douzième siècle, à propos de ces chapitres.

En effet, plusieurs passages posent au sens littéral des problèmes insolubles. Par exemple, les humains ne mangent pas des arbres mais leurs fruits, et aucun arbre n’a jamais donné une connaissance autre que de lui-même. Il y a là forcément un symbole ou une métaphore. La connaissance d’un concept aussi abstrait que le bien et le mal ne nous arrive pas par les aliments et le transit intestinal. Et si un arbre donnait vie, nous serions dans une fable ou un conte de fée. Les serpents parlent-ils ? Une femme peut-elle, à la fois littéralement et raisonnablement, avoir été bâtie à partir de la côte d’un homme ? Et un homme peut-il avoir été créé adulte, comme modelé de la main de Dieu par un Dieu qui aurait donc des mains ?

 

Adam et Eve, de la rumeur au texte

 

Rompant avec la pratique talmudique, l'Eglise a érigé son interprétation des Evangiles et des textes de ce qu'elle a appelé "l'Ancien Testament" en dogmes. De son propre aveu, elle lit la Bible à la lumière des Evangiles, selon le postulat : Jésus-Christ donne le sens du Premier Testament. Jésus est le second Adam. Jésus répare la faute d’Adam. Le péché originel est nécessaire à la justification du Christ, au sacrifice de la Croix et à l’économie du salut. Il faut qu’il y ait une faute ! Les pères du dogme du péché originel ont cherché et trouvé un péché dans le jardin d’Eden en biaisant le texte de nombreuses façons.

L'adam (haadam), l'humain générique, écrit avec un article défini, créé mâle et femelle, a été traduit comme un nom propre, Adam, attribué au premier et unique ancêtre de l’humanité. Le serpent a été arbitrairement identifié à Satan, un ange déchu, rusé, malin dont il n’est jamais question dans le texte. Lorsqu’Elohim, l’un des noms de Dieu, est traduit par Seigneur, nous sommes renvoyés à un contexte féodal et assujettis à une relation de vassalité qui ne sont peut-être pas dans l’esprit du texte. La connaissance du bien et du mal, originellement et incompréhensiblement interdite par Dieu, est devenue la cause d'une malédiction divine éternelle puisqu’héréditaire. La mort, l’opposé de l’éternité, aurait pénétré le monde par la désobéissance du premier homme et de sa femme.

Mais cette thèse qui trahit tant le texte, laisse cependant de nombreux problèmes irrésolus, voir insolubles. Comment un péché peut-il devenir héréditaire et s’imposer à un nouveau-né totalement innocent de ce qui l’a précédé ? Pourquoi la souffrance n'est-elle pas équitablement partagée ? Pourquoi tous les humains ne meurent-ils pas au même âge ? Pourquoi le méchant survit-il à la victime de sa méchanceté ? Pourquoi les animaux, qui ne descendent ni d’Adam ni d’Eve, sont-ils concernés par la souffrance et la mort ? Ce n’est pas seulement la mort qui aura été introduite dans le monde, mais l’injustice !

Ces questions, on se les pose depuis longtemps. Les Evangiles rapportent un dialogue entre Jésus et ses disciples : « Qui a péché, cet homme ou ses parents, pour qu'il soit né aveugle ? Jésus répondit : « Ce n'est pas que lui ou ses parents aient péché ; mais c'est afin que les œuvres de Dieu soient manifestées en lui. » (Jean 9: 3) Jésus manifesta alors les œuvres de Dieu en guérissant l’aveugle de sa cécité. Mais qu’en est-il des aveugles qui n’ont pas rencontré Jésus et n’ont pas été guéris ? Les disciples ne l’interrogent pas là-dessus.

Le christianisme n'est pas seul responsable de l'affirmation d’un péché originel. Le Talmud, le Midrach et certains exégètes juifs évoquent la faute d’Adam dans leurs commentaires. Rabbi Gamaliel, le maître de l’Apôtre Paul de Tarse, l'enseignait aussi. Cependant, ne prétendant pas détenir la vérité, ni ne s'affirmant infaillibles, ils laissent ouvertes des voies de recherches différentes qu’avec Rabbi Isaac nous rencontrerons ici nombreuses à travers le Talmud, le Midrach, le Zohar, Maïmonide, le traité des Portes, le traité des Pères et les récits hassidiques d’Europe centrale.

Marc Alain Ouaknin aime citer cette belle idée de Nahman de Braslav : il est interdit d’être vieux[6]. La thèse de la chute de l’humanité à cause d’un péché originel nous propose de commencer déjà vieux, dans une attitude de vieux : c’était mieux avant. Elle nous insémine une nostalgie fondamentale pour quelque chose que nous n’avons pas vécu, et nous contamine d’un regret pour ce que nous n’aurions pas pu empêcher puisque nous n’y étions pas.

L’étude des récits de la Création demande donc à la fois de corriger les traductions et interprétations mauvaises ou délibérément trompeuses qui en ont été faites et d’y décoder les symboles, les allégories et les métaphores.

En s’appuyant sur des pistes déjà ouvertes par la tradition, Rabbi Isaac va interpréter ici le récit du jardin d’Eden d’une manière vraiment nouvelle. Il va démontrer que l’adam n’a pas fait ce dont on l’accuse. Il voit dans l’interdit de manger de l’arbre de la connaissance, une énigme offerte à l’humanité pour fonder la faculté de s’interroger dont elle est formée. Pour lui, il ne s’agissait pas de rester dans ce jardin mais d’en sortir, pour aller conquérir la Terre. Et cela produit un prologue très différent à l’apparition de l’Homme dans le monde : aucune chute ici, pas de faute à l’origine, mais l’émergence, à partir de l’humanité naissante, de l’humain au singulier, de l’individualité, de l’homme Un, à l’image de Dieu. Et il va tirer un enseignement spirituel de chacune des séquences du récit.

En étudiant minutieusement chaque verset, il éclairera la polysémie des mots et des situations décrites et nous offrira ainsi des outils dont nous pourrons nous servir pour parcourir notre propre chemin d’interprétation et peut-être nous libérer de la malédiction que nous impose la thèse d’un péché originel. Il nous permettra de nous interdire d’être vieux.

Certains mots perdent des nuances essentielles en traduction. C’est pourquoi nous ne les traduirons pas. Ainsi, adamah, la matière (l’argile) dont érèts, la surface du sol, est faite, rendu uniformément en français par « la terre » qui élimine la distinction. De même l’adam, sans majuscule avec l’article défini, ainsi écrit tout au long du récit du jardin : l’humanité, l’humain, le terrien, le Glébeux vu par André Chouraqui. Ich et Icha, deux mots pour distinguer l’humain dans sa spécificité masculine et féminine. Tov, ra et tov vara, non pas le bien et le mal mais les rapports objectifs et subjectifs avec ce que la vie nous offre et, dans ses déclinaisons subjectives, agréable ou désagréable, bon ou mauvais pour moi. Nechamat ‘haïm, l’âme de vies, au pluriel, dans le sens de conscience d’exister. Le premier mot, Béréchit, qui contient une mine de sens que « Au commencement… » réduit très radicalement. Ezèr keneguedo habituellement traduit « une aide semblable », qui ne signifie rien. Et enfin les noms de Dieu[7].

 

Le jeu de l’interprétation

 

Il est dit : Cest avec la Torah que le Saint, béni soit-il, a créé le monde au commencement. (MR BR 1: 1) Selon ce commentaire, la Torah précède le commencement du monde. Rabbi Siméon commente ce commentaire avec ce rapprochement : « J’ai déposé mes paroles dans ta bouche pour planter un ciel et fonder une terre ». (Es 51: 16) Il faut comprendre que ce verset s’adresse à la fois à la Torah et à celui qui la commente. J’ai déposé mes paroles dans la Torah et en toi : dans le texte et dans ton interprétation du texte, pour planter un ciel et fonder une terre. Et Rabbi Siméon poursuit : Il les façonne sans cesse à partir des nouvelles paroles et des secrets de la Torah. (Z P 4b p45) Ainsi par l’étude de la Torah, et en la commentant, chacun participe à la création du monde.

La lumière suprême, le Saint, béni soit-il, la tient en réserve pour les Justes, propose une michna[8] du traité Haguiga en ouverture d’une discussion. (TB Hag 12b sur Ps 97: 11) Par quoi l’homme mérita-t-il cette lumière ? demande Rabbi Eléazar. Par la Torah. Celui qui étudie la Torah, il est compté comme s’il avait bâti des mondes. (Z B III 47a sur TB Chab 114a) De quelle lumière s’agit-il ? C’est la lumière du premier jour, qui précède la création des astres et du soleil, et dont la Torah est la source. (Z B II 30b p173)

Pour les rabbis, et pour Rabbi Isaac également, l’étude de la Torah et des commentaires est la plus importante des activités liées au judaïsme. Elle équivaut à [la pratique de] tous les commandements, dit-on[9]. On la compare à une nuit de noce : l’époux est la Torah écrite, et l’épousée est la Torah orale (les commentaires). (Ketem Paz 24a) Ceux qui y participent font advenir la Présence, la Chékhinah, qui se tient au-dessus de ceux qui étudient la Torah, dit-on aussi. (Pirké Avot 3 6). Et ceux qui l’enrichissent d’une question nouvelle ou d’une tentative de réponse participent de la divinité : La gloire du divin, c’est la gloire de l’épousée (la Torah orale), dénommée « Divinité » (El). (Z P 8a p 62)

L’impératif de l’interprétation est une mitsva[10] qui se trouve dans le Lévitique : daroch darach, interprète tu interpréteras[11]. Deux fois interprète suggère d’interpréter la Torah écrite et les commentaires qui composent la Torah orale.

Le chemin (dérekh, DRKH) sur lequel on marche (darach, DRCh) pour enquêter, questionner (darach) est un récit et une somme de conversations (dérekh) dont la compilation compose le midrach (MDRCh), c’est-à-dire dans ce contexte l’ensemble de la Torah et des commentaires[12].

L’étude de la Torah et des commentaires est donc ainsi une mitsva, un impératif, un commandement, un défi, une épreuve, mais c’est aussi une noce, une fête, un moment de créativité jouissif qui nous permet de créer les cieux et la terre, de participer de la divinité, et enfin de convoquer la Présence. A chacun de découvrir ce que cela signifie pour lui. Mais elle se pratique comme un jeu, un jeu spirituel, qui demande une certaines érudition, un effort enthousiaste, et le courage de s’affranchir de quelques chemins tracés.

Et puisqu’Il consulta la Torah et créa le monde, (MR GR 1: 1 p32) Lui aussi joue au jeu de l’interprétation, dans l’école de l’En-haut, et donc nous pouvons et devons jouer avec Lui, bien qu’Il soit en même temps un personnage du texte et des commentaires, désigné par l’un de ses nombreux noms, Elohim, YHVH, Chaddaï, El, Yah, Eloha, Aïn-sof (l’Infini), ou comme l’Ouvreur des jours, l’Ancien des anciens, l’Occulté, le Passeur des jours, le Saint-béni-soit-il, etc. ou évoqué par un Il mystérieux ou un Tu familier, et que l’on invoque comme pour appeler l’inspiration : « Dessille mes yeux pour que je puisse contempler les merveilles de la Torah », chante David. (Ps 119: 18)

Ceux qui pratiquent le chabbat en ouvrent la sacralité en prononçant le kiddouch, une bénédiction sur une coupe de vin[13]. Cette parole symbolise et crée la séparation entre les six jours de la semaine et le chabbat, septième jour, cessation de l’activité de la ronde des jours, pour sortir de nos habitudes, ouvrir un autre temps, faire autre chose. Mais pour ceux qui pratiquent l’étude, le kiddouch à une signification supplémentaire : il désigne l’espoir et l’aspiration à renouveler le sens du texte à travers une question nouvelle ou une nouvelle approche. Et donc l’effort de chercher à neuf et ainsi se prémunir de tout automatisme en l’abordant. Et cela permet, dit-on, de renouveler le monde. Ce monde qui n’existe que lorsque nous l’interrogeons, comme dit Nahman de Braslav[14].

 

Une joute

 

Le Talmud, les midrachs et le Zohar ont été rédigés dans la forme de conversations entre érudits commentant un verset ou un commentaire et prennent souvent la tournure d’une joute de poètes mystiques assemblés pour produire de belles paroles. L’un après l’autre improvisait sur la Torah, raconte Moïse de Léon, l’auteur du Zohar. (Z P 8a p61) Ils convoquaient aussi les ancêtres en citant leurs réponses et les prolongeaient de leurs propres inspirations, rivalisant d’éloquence que les participants ponctuaient parfois d’approbations et de louanges : les compagnons s’approchèrent de Rabbi Siméon et lui dirent en pleurant : si nous n’étions venus au monde que pour entendre ces paroles, cela nous aurait suffi. (Z P 2a p34) Ils s’appelaient entre eux compagnons, valeureux, vénérable, fils de la flamme sainte, fils de la lumière de la Torah, fils du Palais du roi. Tous étaient fils du dais nuptial. Ils s’invitaient les uns les autres à offrir un « joyau » à l’épousée, c’est-à-dire à enrichir la Torah orale d’une nouvelle interprétation. Et chacun essayait de se surpasser en virtuosité, finesse, humour, audace et sagacité. Pour faire advenir la Présence.

L’époque de la kabbale est contemporaine de celle de Chrétien de Troyes. J’aime à penser que la kabbale est au judaïsme ce que la chevalerie a pu être au christianisme et à ce qui l’a précédé en Europe.

A la quête du Saint Graal des chevaliers de la Table ronde à travers les forêts perdues, les kabbalistes substituent la fréquentation assidue d’un texte entièrement consonantique, où toutes les lettres sont attachées, et écrit sur des parchemins enroulés, et qui recèle des trésors. Au sein de la Torah, combien d’éminents secrets enfermés gisent, combien de trésors cachés y sont celés ! alerte Rabbi Yissa dans le Zohar. (Z II HS 132a p227) Ils ont aussi une bibliothèque de commentaires qui leur offre des indices, des pistes, des propositions, et des énigmes qui répondent à d’autres énigmes, des défis. Comme les valeureux compagnons d’Arthur, ils vont à travers ce monde en quête d’un autre monde, mystique, spirituel, mystérieux.

Pour contrées lointaines aux limites des terres connues où les chevaliers rencontrent des épreuves qui leurs révèlent leur degré de pureté, leur intimité avec le Graal, et donc leur aptitude à le trouver ou à s’en approcher, les kabbalistes se donnent les limites supérieures et inférieures du questionnement inscrites dans le mystère du nom Elohim. L’épreuve consiste à déceler une ruse dans un groupe de lettres, à trouver un joyau dans un mot coupé en deux, à chercher un trésor dans une question. Ils transforment le combat en arme et ses règles, en méthode de discussion, en herméneutique. Leur défi : composer des énigmes dans lesquels on puisse se perdre. Leur Graal : percer un mystère et en ouvrir un nouveau. Leur courage : oser parler de Dieu à Dieu.

La Quête du Graal de Chrétien de Troyes est un roman inachevé, c’est-à-dire sans fin, mais on a compris que le Graal était la sainte quête elle-même, et les compagnons d’étude de Rabbi Siméon que le Zohar fait dialoguer à travers le temps et l’espace le savent aussi. Ce n’est pas la Vérité que l’on cherche - et personne ne la trouve -, mais une parole nouvelle, un joyau à offrir à l’épousée. Le royaume à conquérir n’est jamais conquis, et nul n’y règne jamais en souverain. Certains des maîtres sont plus inspirés que d’autres, mais tous ceux qui ont participé à la noce sont vainqueurs et glorieux parce qu’ils reçoivent tous le joyau que l’un d’eux a révélé. Et il n’y a pas de fin. Le commentaire est sa propre fin. Car c’est par lui que s’approche la Présence.

Ils descendent de la civilisation des bâtisseurs de pyramides ; ils sont contemporains des bâtisseurs de cathédrales. Mais leur œuvre n’est pas de pierre, mais de paroles. Ils construisent une pyramide métaphysique, ils bâtissent une cathédrale de commentaires qui édifient un univers où ils tissent le lien entre l’En-haut et l’En-bas, renouvellent le monde, se donnent accès aux mondes cachés qui s’appellent « cieux nouveaux ».

Qui sont les méchants, les ennemis, les barbares, pour les kabbalistes ? Ceux qui prennent le texte uniquement au premier degré. L’Ecriture a un corps, ce sont les commandements. Elle a aussi des habits, ce sont les contes. Et enfin elle a une âme, qui constitue la partie essentielle et fondamentale. Malheur aux coupables qui prétendent que l’Ecriture n’est qu’une simple narration. (Z III 152a)

C’est ainsi que la Torah ne doit pas être lue, mais étudiée. Elle a soixante-dix faces. D’innombrables significations qui habitent tous les textes de la Torah, et toutes sont justes, enseignent les maîtres[15]. Ainsi, il s’agit de caresser l’âme insaisissable d’un texte habité par la Présence grâce aux énigmes de la sagesse, dans l’au-delà de la narration, dans le jeu des sens appelé merveilles, qui nous posent une multitude de questions nouvelles et sont autant de joyaux qui rendent les cieux nouveaux. Et cela donne l’enjeu du jeu.

On commence le jeu de l’interprétation en posant une question, puis en évoquant le commentaire qu’un autre a proposé quelques siècles auparavant, et puis on cherche, on tente son propre commentaire, on trace son propre chemin. Et on joue.

Il faut jouer.

C’est ce que nous allons faire aussi tout au long de ce livre. C’est un jeu infini. Un jeu qui permet de caresser l’Infini sans jamais le réduire.

Et nous jouons chaque jour une partie nouvelle.

Car demain, tout sera à nouveau remis en jeu. Et l’on tentera encore de faire advenir la Présence par l’un des soixante-dix chemins dont chaque mot est un carrefour. « Ce qui est important est moins ce qui est écrit que ce que cela peut nous amener à dire si c’est une merveille », disait souvent Rabbi Isaac, d’une manière ou d’une autre.

 

Les règles du jeu

 

La Torah est une suite ininterrompue de consonnes, sans espace entre les mots et les phrases. Les espaces et les voyelles, qui ont été ajoutés par les Massorètes entre le 6e et le 10e siècle, ne doivent être considérés que comme des indications d’interprétation. Le Kabbaliste se penche sur le texte sans voyelle et sans espace, avec toutes les voyelles possibles dans la polyphonie des consonnes. Car ainsi, la Torah demeure un texte merveilleusement mystérieux qui permet de jouer sans fin à trouver des sens nouveaux.

Mais ce jeu comporte des règles.

Celles des quatre niveaux de sens et d’interprétation données par le mot pardès (PRDS) formé de quatre consonnes qui évoquent : , pour Pchat, le sens littéral ; rèch pour Remèz, le sens par allusion et contigüité qui permet de rapprocher un verset d’un autre hors de son contexte et d’alimenter une quête du sens ; on associe aussi un mot à un autre par homophonie, les Rabbis du Talmud pratiquaient souvent le calembour ; dalet pour darach, dérach, où il s’agit de citer les commentaires et de les commenter, de parcourir les chemins tracés et d’en percer de nouveaux ; et enfin sod, pour le niveau secret, mystique, intuitif, le sens le plus fin, le plus libre, le plus inspiré. L’envol.

Les règles de l’interprétation à la manière kabbaliste, déjà utilisées dans le Talmud, mais qui prennent avec le Bahir et le Zohar[16] un essor dans les dimensions mystiques, permettent d’entrer plus profondément encore dans les sens d’un mot et de jouer avec lui, de le regarder comme un diamant aux multiples facettes, de suivre ses reflets, pour enfin se laisser absorber par la lumière de ses mystères.

On commence par chercher tous les sens d’un mot. Ils en ont tous au moins deux. On le considère par sa racine. On va chercher sa première apparition dans la Torah, et ensuite ses autres occurrences, pour mieux déployer ses nuances dans les contextes où il apparaît.

On trouve du sens par contigüité avec le mot ou le verset immédiatement précédant ou suivant ou dans l’intertextualité, en rapprochant un verset comme commentaire de celui qu’on étudie, ou en évoquant ce qu’un ancêtre a déjà dit.

Chaque lettre ayant un sens individuel, on déplie le sens d’un mot par celui de chacune de ses lettres. On permute les lettres d’un mot ou d’un groupe de mots pour considérer ce que ces mêmes lettres peuvent dire lorsqu’elles sont organisées différemment.

On peut lire en ajoutant une ou plusieurs lettres du mot précédent ou suivant puisqu’on ne sait pas où il commence et où il finit.

On calcule la valeur numérique du mot en additionnant celle de ses lettres (Guématria). Et comme d’autres mots, composés de toutes autres lettres, ont la même valeur numérique, on obtient une association de sens encore plus décalée, une sorte d’énergie du sens. Mais de façon surprenante, ces rapprochements semblent aussi pertinents que le sens littéral[17].

Et après avoir fait cela, on joue avec les sens que l’on a aperçus.

Ainsi, grâce à son ambigüité, et à l’ambigüité que nous lui ajoutons, le texte devient performatif : par le travail que nous y faisons, par les sens que nous en dégageons, il nous permet de participer à la création du monde et d’y vivre.

Ce n’est pas la Vérité qui est recherchée mais le contraire de la Vérité, une nouvelle vérité. Une vérité éphémère qui sera ébranlée par une nouvelle question et nous permettra d’entrer dans l’expérience du renouveau du monde, parce qu’éclairée différemment.

Si ces méthodes d’interprétation peuvent paraître farfelues ou arbitraires, elles ne le sont pas plus que les règles de n’importe quel autre jeu, et elles nous autorisent à nous libérer de l’asservissement au texte qui, lorsqu’il est pris pour univoque, sacré et immuable, constitue une sorte de prison, d’asservissement, de malédiction. Car la tradition est un joyau. Mais c’est aussi un cadavre. C’est un cadavre lorsqu’on en décrète une interprétation univoque et dogmatique, fermée comme une tombe. On en fait un joyau en la ressuscitant d’une nouvelle interprétation. « Les réponses sont les ténèbres ; nos questions font la lumière », disait Rabbi Isaac.

Il étudiait et commentait selon une méthode que je décrirais comme une spirale, circulaire et ascendante, formant un faisceau lumineux pointant vers l’idée qu’il tentait d’approcher, de modeler, de révéler sous différents angles. Il ne pouvait pas en être autrement car son raisonnement était bâti avec un matériau, des mots ou des commentaires, dont les sens sont multiples et doivent être observé plusieurs fois.

 

Dieu, Rabbi Isaac et moi

 

J’ai rencontré Rabbi Isaac dans une librairie juive de Belleville. Il était alors retraité. Il avait été tailleur. Je l’ai appelé Rabbi parce que je considérais qu’il était un maître dans la tradition qu’il étudiait et le chemin spirituel qu’il indiquait[18].

Je suppose que sa manière d’aborder l’étude de la Torah s’inspire de la tradition hassidique d’Europe centrale, car j’en ai retrouvé des accents et des saveurs dans les récits hassidiques de Martin Buber, chez Hayyim de Volozhyn, Nahman de Braslav, Scheour Zalman de Liadi, l’auteur du Tanya, dans les Célébrations d’Elie Wiesel… Mais Rabbi Isaac n'insistait pas sur l'observance des mitsvot, des prières, des bénédictions, etc. Il se concentrait sur la Torah et l’a étudiée presque tous les jours de sa vie. Il s’en nourrissait. Il s’élevait en l’élevant, et ainsi pratiquait ce dont parlent les maîtres du hassidisme : « le trône porte ses porteurs »[19].

Pour Rabbi Isaac, la question du Dieu de la Torah, ne se posait pas en termes d’existence ou d’inexistence, comme je la formulais alors avec naïveté. Rescapé de la Shoah, il ne pouvait pas avoir foi en un Dieu intervenant dans l’Histoire, parce que justement il n’était pas intervenu à un moment extrêmement critique de l’Histoire. Il distinguait le Dieu « prêt-à-croire », auquel il ne croyait pas, du Dieu qui apparaît sous formes de noms dont il nous appartient de caresser affectueusement les mystères. Et qui devient ainsi le moyen d’une ouverture sur de l’indéterminé, et donc un souffle de liberté.

Lorsqu'il prononça le mot Dieu pour la première fois, il me vit tiquer. J’étais dieu-irritable comme d’autres sont allergiques au pollen et certains produits sont éco-incompatibles. Alors, il se pencha vers moi et dit dans un chuchotement, comme s'il me révélait un important secret : « Peu importe qu'il existe ou non, regardons dans le Livre ce que nous pouvons réfléchir là-dessus ; il n'est pas nécessaire d'avoir la foi pour lire la Torah. » Il prenait Dieu comme l'un de ses personnages, une allégorie, généralement celle de la sagacité. Il l'appelait souvent le Grand Pédagogue. Et il ne se parait pas de l’obséquiosité dont se parent d’habitude les religieux lorsqu’ils parlent de Dieu, comme pour inhiber les questions que ce personnage ne devrait pas manquer de susciter à un esprit libre. « Tu n’as pas besoin de croire en l’infini, de toute façon tu ne peux pas le penser, m’a-t-il dit un jour, donc, l’Infini est béni, béni soit-il, parce qu’il te permet d’aller à la limite de la pensée. »

Et il m’acceptait tel que j’étais.

Il n’était pas un maître austère. Il n’incitait pas à se détourner du sensible pour accéder au divin. Au contraire, bénissait la vie et tout ce qu’elle offre.

Dans les années pendant lesquelles j’étudiais avec lui, je voyageais aussi plusieurs mois par an. Je suis allé en Inde, en Amazonie, j’ai fréquenté des monastères chrétiens, bouddhistes, des ashrams, l’université d’été des Loubavitch à Serre Chevalier, ainsi que le courant des soufis… En même temps que je découvrais l’Infini des kabbalistes, je contemplais la vacuité de l’esprit des bouddhistes tibétains et étudiais la philosophie de la non-dualité des hindous. Je pratiquais ainsi différentes manières que les hommes ont trouvées de caresser l’Infini, comme le disait Rabbi Isaac.

Je demande pardon au lecteur pour mes questions ou mes interventions parfois irritantes, incongrues ou insistantes. Imaginez la patience de Rabbi Isaac à l’aune de votre exaspération, car j’en ai gommé la plupart. J’aimais le défier. Il aimait l’être. Un maître est à la hauteur des questions qu’on lui pose. Et j’aime à penser que mes questions ont contribuées à amener Rabbi Isaac à dire ce qu’il dit. « Et vous, que dites-vous ? », lui demandais-je souvent après qu’il ait eu cité la Torah et les commentaires, pour l’amener à offrir son joyau au mystère.

En général, les athées et ceux qui a priori ne croient pas en Dieu, ne s’intéressent pas à Dieu et aux livres dans lesquels il est question de Dieu. Moi, si. Dieu est un personnage incroyable, irrationnel et incohérent, je n’y crois pas, mais cela ne m’empêche pas de m’intéresser à lui et à ceux qui se sont intéressés à lui et ont acquis malgré tout un peu de sagesse.

Au tout début, Rabbi Isaac s’est moqué de moi : « Tu n’es pas un athée, tu es un ignorant. En fait, tu ne sais pas en quel Dieu tu ne crois pas ! » Un peu plus tard, commentant cette parole de Rabbi Simon ben Lakish dans le Talmud : Si tu vois un disciple des sages qui, tel un serpent, est plein de hargne et de fureur, fréquente-le sans crainte. Mais si tu vois un ignorant pieux, ne t’en approche pas, il a ajouté : « Quant à toi, tu es ignorant, mais tu n’es pas pieux ; et tu es plein de hargne et de fureur, mais tu es un disciple de la sagesse[20]. » Et par la suite, il m’a dit : « Dieu existe pour qu’on l’interroge. Et pour la même raison, il n’existe pas. »

Il aimait aussi rappeler : « Il est permis de tout dire. Il n’y a pas d’interdit. Mais il faut que ta parole soit utile à l’homme, lui permette de vivre, de comprendre et de connaître. Qu’elle soit douce, lumineuse, ouvre sur une clarté nouvelle. » Tels étaient ses propres défis, sa propre règle, l’élégance de son jeu.

Maintenant, jouons.

1

Qu’est-ce qu’un homme ?

 

 



[1] Expression impropre puisque les polythéistes hindous ont aussi des livres anciens et fondateurs : les Vedas, les Upanishads, les Brâhmanas, le Mahâbhârata, le Ramayana, les Purânas, etc. Les bouddhistes ont les Sutras.

[2] Torah : ce sont d’abord les cinq premiers livres de la Bible, puis par extension l’ensemble du texte de « l’ancien testament ». Torah signifie enseignement et orientation. Bible, du grec ta biblia : les livres.

[3] La Bible fut écrite sur une période de 1000 ans. C’est une compilation de textes épars, travaillés et réécrits jusqu’à la version finale qui nous est parvenue. Selon les découvertes archéologiques les plus récentes et les travaux des historiens, des archéologues et des linguistes entre les années 1970 et 2000, le récit de la Création serait postérieur de cinq à dix siècles au récit du jardin qui lui succède. Le premier chapitre évoque la création de l'homme par Elohim ; celle-ci est reprise différemment au second chapitre. Nous étudierons le texte tel que le compilateur nous l'a transmis, tel qu'il s'offre à nous, dans sa continuité, avec ses imperfections et ses contradictions. Voir Israël Finkelstein et Neil Asher Silberman, La Bible dévoilée : Les Nouvelles révélations de l'archéologie, éd. Bayard, 2002.

[4] La tradition interdit de prononcer le nom de Dieu : « Tu n'invoqueras pas le nom YHVH ton Elohim Dieu en vain. » (Exode 20: 7). Si le nom YHVH ne doit pas être prononcé, ce n'est sûrement pas pour qu'il soit remplacé par un autre mot, Seigneur, Adonaï, Hachem (LeNom), etc. mais justement pour que rien ne prenne la place de ce silence. Nous écrivons YHVH en toutes lettres et sans voyelles, de sorte qu’il ne soit pas prononçable, mais qu’il soit possible de le lire.

[5] Les arbres, les animaux, et l'homme avaient déjà été créés. L'homme est alors formé avant les animaux.

[6] Marc-Alain Ouaknin, Lire aux éclats, éd. Lieu Commun, 1989, p280. Nahman de Braslav (1772 – 1810) arrière-petit-fils du Baal Shem Tov, né à Medzhybizh en Ukraine.

[7] Nous présentons en Annexe 6 les versets du chapitre 1 (1-5 et 24-31) ainsi que du récit du jardin d’Eden (Chapitre 2 et 3) dans une traduction au plus près de l’interprétation de Rabbi Isaac.

[8] La Michna compile les différentes traditions orales, leurs polémiques et leurs conclusions sur différents passage de la Torah. Les commentaires sur la Michna, écrits pour une grande part en araméen, ont été compilés sous le nom de Guémara par les Amoraïm. L'exposé de la Michna et son développement dans la Guémara forment le corpus du Talmud. Une michna est un passage de la Michna.

[9] Michnah Préah 1: 1. Rabbi Schneour-Zalman de Liadi, Likoutei Amarine (tanya) Chap. 37.

[10] Mitsva (pluriel : mitsvot) : devoir religieux ou moral donné par la Torah ou d’origine rabbinique.

[11] Cherche tu chercheras. (Lévitique 10: 16). Marc-Alain Ouaknin fait remarquer que ces deux mots sont au milieu exact de la Torah : « Enseignement d’une importance capitale : le cœur du livre est un espace vide qui sépare deux mots identiques dont la signification exacte est l’impératif : « Interprète ! ». En effet le mot daroch ou darach, de la racine hébraïque דָּרֹשׁ, DRCh, signifie « interpréter » et a donné le mot MDRCh, Midrach. » (Marc Alain Ouaknin, Mystères de la Bible, éd. Assouline, 2008, p355-356). La Torah dans ce contexte est l’ensemble de cinq premiers livres.

[12] On verra ici la transcription des mots hébreux vocalisés en italique, et leurs formes consonantiques en majuscules selon la correspondance des lettres hébraïques donnée en Annexe 1.

[13] « Et ce fut soir et ce fut matin, jour le sixième. Et furent achevés les cieux et la terre, et toute leur armée. Dieu acheva au septième jour Son œuvre, qu'Il avait faite, et Il S'abstint au septième jour de toute Son œuvre, qu'Il avait faite. Dieu bénit le septième jour, et Il le sanctifia, (…) » Votre attention, maîtres, rabbins et messieurs-mesdames. Béni es-Tu, Eternel notre Dieu, Roi du monde, qui nous a sanctifiés avec Ses commandements, nous a désirés et nous a donné, avec amour et volonté, Son saint chabbat en héritage, souvenir de l'Œuvre de la Création ; premier de Ses saintes convocations, commémorant la sortie d'Égypte. Car Tu nous as donné Ton saint chabbat en héritage. Béni es-Tu Éternel, qui sanctifies le chabbat. Amen. »

[14] « Ce n'est pas le monde qui est le lieu de la question, mais la question qui est le lieu du monde. » Nahman de Braslav.

[15] Z B III 54a p276; Nombre Rabba 13: 16. On dit 70 pour signifier énormément.

[16] Sefer HaBahir, le livre de la lumière, aussi connu sous le titre Midrach de Rabbi Nehunya ben HaKanah, composé au 1er siècle. Le Zohar, ou Sefer HaZohar (Livre de la Splendeur), est l'un des ouvrages majeurs de la Kabbale d’abord attribué à Rabbi Shimon bar Yohaï, du IIe siècle, on considère aujourd'hui qu'il fut rédigé en Espagne par Moïse de León entre 1270 et 1280.

[17] Il existe d’autres règles. La Temourah, dans laquelle chaque lettre d’un mot est remplacée par la lettre précédente ou suivante dans l’alphabet. Le Notariqon, où chaque lettre d’un mot est prise pour l’initiale ou l’abréviation d’un autre mot. Etc. Une parole ponctuée d’un comme il est écrit indique une citation d’un verset de la Torah et est transcrite ici entre guillemets. Comme il est dit, renvoie à un commentaire qui est cité ici en italique.

[18] Un rabbin est un homme qui a suivi une formation au séminaire et a obtenu un diplôme. Un rabbi est un maître parce qu’il est ainsi considéré par un ou plusieurs disciples.

[19] Cité par Rabbi Hayyim de Volozhyn, Nefesh Hahayyim, l'âme de la vie, premier portique, Chap 5. p15, éd. Verdier, sur Ezéchiel 1: 21.

[20] La citation du Talmud : TB Chabbat 63a p192.